Alors que les transitions écologiques, numériques et sociales redéfinissent en profondeur les pratiques et les compétences du design, la France doit se donner les moyens d’adapter cette discipline stratégique aux enjeux contemporains. Le diagnostic réalisé met en lumière plusieurs axes prioritaires pour structurer les métiers et les formations, et ainsi permettre au design de jouer pleinement son rôle dans la transformation des secteurs économiques et sociaux
Structurer le design autour de domaines stratégiques
Pour accompagner les mutations globales, le design doit se décliner en des champs d’action clairement définis. Six domaines prioritaires émergent : les industries culturelles et créatives (ICC), la santé, les transitions industrielles, le numérique et l’intelligence artificielle, l’agriculture et l’alimentation, et enfin les territoires, la démocratie et l’éducation.
Dans chacun de ces secteurs, les besoins sont immenses. En santé, le design peut contribuer à l’amélioration des parcours patients grâce à des services numériques inclusifs. Dans l’agriculture, il est un atout pour concevoir des systèmes alimentaires durables et réduire le gaspillage. Sur le plan industriel, l’éco-conception et l’économie circulaire s’imposent comme des priorités. Ces exemples montrent que le design, loin de se limiter à l’objet ou à l’image, intervient désormais dans des systèmes complexes, en collaboration avec des acteurs multiples.
"Il faut donner plus de pouvoir et de moyens aux écoles de Design elle-même pour qu'elle monte en compétence et diversifie leurs offres. Explorer peut-être l'articulation entre art et design en France qui est si particulier."
Renforcer les collaborations écoles-entreprises
Une réforme en profondeur des formations passe par un rapprochement des mondes académique et professionnel. Les partenariats entre écoles de design et entreprises doivent se multiplier, notamment sous forme de laboratoires d’innovation partagés ou de programmes de co-innovation. Ces initiatives permettent de connecter directement les étudiants aux réalités du marché, tout en favorisant une recherche appliquée, tournée vers les défis des transitions.
Les stages longs et les contrats d’apprentissage constituent également une réponse pour mieux ancrer les compétences des designers dans des contextes concrets. Inspirée des pratiques internationales, la création de chaires d’entreprise dédiées au design pourrait par ailleurs contribuer à dynamiser la formation continue et à encourager l’upskilling des professionnels en activité.
"Tous les projets devraient être faits à partir de vrais briefs donnés par des entreprises et des collectivités. Et le design étant une culture de la collaboration, les projets donnés devraient mixer des designers et des étudiants d'autres disciplines."
Imaginer une vision à long terme
Pour préparer les métiers du design à l’horizon 2030, il est essentiel de favoriser une approche systémique et interdisciplinaire. Cela passe par une réforme des cursus, mais aussi par une plus grande internationalisation des parcours, à travers des doubles diplômes, des échanges universitaires ou des collaborations intersectorielles. Ces dynamiques, déjà en place dans des institutions comme Aalto University ou le Royal College of Art, doivent devenir des références pour les écoles françaises.
Le design peut également s’appuyer sur la création de hubs régionaux, véritables plateformes d’innovation où entreprises, chercheurs et institutions travaillent de concert. Ces espaces permettraient de mutualiser les savoirs et de diffuser des pratiques exemplaires sur l’ensemble du territoire.
Enfin, le design doit s’affirmer comme un acteur stratégique des transitions, en mettant l’accent sur des principes fondamentaux : durabilité, inclusion et innovation. En renforçant sa structuration et en adaptant ses formations aux défis contemporains, la France peut positionner le design comme élément central d'une stratégie globale visant à répondre aux transformations globales.
"Si on veut faire grandir les designers et le design dans leur fonction, il faut leur donner des moyens de positionner leur expertise [...] car je vois les trajectoires professionnelles. Les échanges avec les designers intégrés et les design managers mettent en lumière l'importance des stratégies non seulement d'intégration mais aussi de portage du projet et de transmission sur le long terme."