La vaste enquête menée auprès des professionnels et des établissements de formation révèle les transformations profondes qui traversent les métiers du design. Entre aspirations à l'innovation et attachement aux pratiques traditionnelles, le secteur cherche son équilibre.
"L'innovation sera au cœur des métiers du design de demain." Ce constat, partagé tant par les employeurs que par les formateurs, émerge d'une étude d'envergure menée par le consortium CMA Design. Cette radiographie du secteur dévoile une profession en pleine mutation, où les frontières traditionnelles s'estompent au profit de pratiques plus transversales.
Une profession qui se réinvente
Les chiffres sont éloquents : la moitié des designers exercent aujourd'hui en tant qu'indépendants, tandis que l'autre moitié évolue au sein d'entreprises, souvent dans de petites équipes. "Cette répartition témoigne d'une grande flexibilité du métier", analyse l'étude. Plus surprenant encore, un quart des designers sont désormais rattachés directement à la direction générale de leur entreprise, signe d'une reconnaissance stratégique croissante de la discipline.
Les perspectives d'emploi apparaissent encourageantes : plus des deux tiers des employeurs prévoient des recrutements dans l'année à venir, une proportion qui grimpe à 78% à horizon cinq ans. Les secteurs de la santé et du numérique se montrent particulièrement dynamiques, illustrant l'extension du design vers de nouveaux territoires.
Formation : le grand écart
Côté formation, le paysage se révèle contrasté. Les établissements, qu'ils soient privés ou publics, font face à un défi majeur : adapter leurs enseignements à des pratiques professionnelles en constante évolution. Si l'innovation figure au programme de 70% des formations, les pratiques traditionnelles comme le design de produits ou le design de marque occupent encore une place prépondérante dans les cursus.
Un décalage qui interroge : alors que les employeurs anticipent un recul des pratiques traditionnelles au profit de l'innovation et de la recherche, certaines formations peinent à opérer ce virage. "Il existe un véritable enjeu d'adaptation des contenus pédagogiques aux besoins futurs du marché", souligne l'étude.
Des signes d'alerte
Plusieurs points d'attention émergent de cette enquête. La formation continue, notamment, apparaît comme le parent pauvre du secteur : seuls 40% des professionnels déclarent en avoir bénéficié. Plus préoccupant encore, à peine plus d'un tiers des structures disposent de grilles de compétences en design, révélant un manque de formalisation des parcours professionnels.
L'étude met également en lumière un paradoxe : alors que les Industries Culturelles et Créatives (ICC) constituent l'un des principaux débouchés pour les jeunes diplômés, les employeurs de ce secteur prévoient moins d'embauches à cinq ans que leurs homologues du numérique ou de la santé.
Vers une redéfinition du métier
Cette enquête dessine en filigrane l'émergence d'un nouveau profil de designer, plus polyvalent, davantage tourné vers l'innovation et la recherche. Une évolution qui nécessite une réflexion profonde sur l'adaptation des formations. Car si les établissements d'enseignement ont bien identifié ces mutations - comme en témoigne la place croissante accordée à l'innovation dans les cursus - le défi consiste désormais à trouver le juste équilibre entre l'apprentissage des fondamentaux du métier et l'acquisition des nouvelles compétences exigées par le marché.
Face à ces mutations, l'enjeu pour la profession apparaît double : préserver son identité tout en s'ouvrant à de nouveaux horizons. Un défi que le secteur semble prêt à relever, fort d'une capacité d'adaptation inscrite dans son identité même.